Artiste associé
Jan Kopp
Courir les Rues
de septembre 2013 à août 2014
Chaque année, La Criée associe un·e artiste à ses projets. Cette collaboration, en mettant l’art encore plus au centre, instaure une nouvelle façon de travailler dans la durée avec les artistes, au plus près du processus créatif.
« Jan Kopp, artiste nomade, court les rues des villes depuis quelques années : celles de Berlin, de Paris et de Rome déjà. Cette année, c’est à Rennes qu’il usera ses semelles.
Jan Kopp a un rapport très direct avec la ville : s’il la court et la parcourt, c’est qu’elle constitue une source d’inspiration toujours renouvelée, dont il tire une poétique urbaine située à la croisée des tensions sociopolitiques exacerbées, de l’éclosion incontrôlable de la liberté individuelle et de la beauté enfouie des paysages bétonnés.
Pour Courir les Rues, il propose une exposition, entièrement inédite, Un Grand Ensemble, élabore un projet dans l’espace public impliquant étudiants et habitants rennais et, plus largement, nourrit la programmation de ses intérêts, idées et recherches.
J’ai commencé à courir vers quinze ou seize ans, assez régulièrement. Près de la maison où j’habitais se trouve un lac, un chemin d’environ six kilomètres en fait le tour. Je cherchais à réaliser ce parcours de plus en plus vite. Puis, cette obsession de la performance m’a lassé et j’ai abandonné la course à pied.
Je l’ai reprise vingt ans plus tard, un été à Paris. Une nuit d’insomnie, je me suis levé, je suis sorti et j’ai recommencé à courir. Je portais des vêtements et des chaussures de ville. Seul sur les grands boulevards, je n’entendais que ma respiration et mes pas. J’ai couru ainsi plus d’une heure, sans choisir de parcours particulier, sans m’arrêter. Le lendemain, j’ai fait de même. Par la suite, je me suis équipé et j’ai pris l’habitude de courir à l’aube, dans les rues, d’abord à Paris puis à Berlin où je suis allé vivre quelques années.
Courir la ville, c’est me l’approprier, créer un rapport actif avec elle, ne pas la subir.
C’est une conquête aussi bien poétique que physique.
Je cours lentement, sans regarder ma montre, sans connaître les distances. Je change régulièrement de parcours. Je découvre ainsi la ville. Elle est presque vide à cette heure et les rares personnes visibles sont pour la plupart ivres et/ou amantes. Pendant la course, la ville devient légère, flottante, volatile ; les sons qu’elle produit, les perspectives qu’elle présente n’existent pas autrement.
Quand j’arrive dans une ville que je ne connais pas, je cherche à la comprendre par sa géographie. J’en réalise des cartes et des plans ; je l’explore comme lieu potentiel d’interventions.
Je cherche les marchés, les parcs, les grands axes, les rivages, les labyrinthes des centres historiques et les monotonies des périphéries. Je cherche la transformation discrète, inattendue, allant jusqu’à la contradiction.
Je cherche comment la ville se forme et se déforme.
La ville est un grand ensemble qui nous regarde et qui nous parle dans sa propre langue. »
Jan Kopp